C’est un Zénith comble et conquis d’avance qui attendait Aurora ce lundi 5 mai à Paris. Connue pour son aura éthérée, sa voix cristalline et sa poésie organique, la chanteuse norvégienne défendait sur scène son dernier album « What Happened to the Heart? », lequel a donné le nom à la tournée « What Happened to the Earth ».
Avant l’arrivée de l’une des artistes norvégiennes les plus connues au monde, le groupe Fredrik Svabø monte sur scène pour offrir ce qu’il sait faire de mieux : un moment jazz plus que positif et accueillant. Ensuite, place à la France : joanna rejoint les planches du Zénith de Paris. Malgré des problèmes avec ses oreillettes, la française ayant concouru pour Destination Eurovision en 2022 et présente à Musilac l’été dernier fait tout pour donner le meilleur d’elle même. Sonorités techno-pop proches de l’univers de Kalika, messages engagés, tout y est.
Mais celle qui est vraiment attendue ce soir, c’est bien Aurora. En même temps, l’artiste avait rempli son Olympia du 30 septembre 2024 en à peine 24 heures. Et ce 5 mai 2025, le Zénith de Paris est plus complet que jamais. Rares sont les fois où les publics sont placés dans cette salle, faute de places ! Depuis ses débuts en 2015 avec l’EP Running with the Wolves, Aurora a conquis les scènes et les coeurs. Rapidement, l’artiste s’est imposée comme une figure unique de la pop alternative nordique, croisant électro onirique, contes scandinaves et engagement viscéral. Dès les premières notes de Goddess of the Dusk, le ton est donné. L’écran géant s’allume progressivement pour dessiner le visage d’Aurora – comme ce fut le cas lors de nombreux moments de la soirée.

L’énergie de la chanteuse ne se fait pas attendre. Aurora apparaît telle une prêtresse sylvestre, animée d’une ferveur presque chamanique, toujours positive. Churchyard et Soulless Creatures s’enchaînent dans une atmosphère suspendue, bien que les gradins aient encore du mal à lâcher prise. La gestuelle est toujours aussi habitée, sincère et singulière, nous en avions le souvenir d’un intense Cabaret Vert en 2022 (nous en parlions dans les colonnes de Festileaks, à l’époque). Lorsqu’elle prend la parole, ses tirades s’étendent : Aurora exprime son émotion, non pas sans y inclure du français, revient sur ses paroles, se perd dans ses mots, toujours avec un petit rire affectueux et une proximité sincère avec son public. Attendri, le public rit, sans jamais se moquer, rejoint la complicité, et surtout, l’amour partagé avec l’artiste sur scène. Engagée, elle prime l’amour universel et revient rapidement sur l’actualité politique, sans s’attarder sur un événement en particulier, bien que très implicite. Un message marque : « les enfants ne naissent pas mauvais » Aurora rappelle le poids des tristesses et des émotions, lesquelles peuvent traverser les générations et être un poids pour chacun d’entre nous. À partir de son propre vécu – sans s’y attarder, l’artiste offre des messages et du réconfort dans le coeur des milliers de spectateurs. C’est peut-être cela, en dehors de la musique, qui fait le succès de cette artiste engagée et émouvante.
The River et A Soul With No King réveillent la salle avec une énergie plus tribale, où les percussions et les beats électroniques deviennent organes vitaux du show. Vient Heathens, un moment plus grave, presque apocalyptique, avant de plonger dans The Forbidden Fruits of Eden et When The Dark Dresses Lightly, deux titres récents porteurs de cette lumière qu’elle célèbre autant qu’elle la questionne. Ce dernier titre propose d’ailleurs l’une des scénographies les plus impressionnantes de la soirée : des lumières rouges prennent le contrôle de l’ambiance, Aurora apparaît sur les écrans géants, un couteau à la main, le visage dessinant des émotions souvent différentes. Le tout, sous un effet de ralenti – très, très ralenti.
Puis, Exist for Love et Queendom, hymnes féminins et universels, suscitent une véritable communion avec le public. Le premier titre offre une ambiance des plus calmes, en contraste total avec l’ambiance du précédent titre. Le second propose un message similaire – et un mot-titre qui aurait du être inventé bien avant ce titre, dans une ambiance plus dynamique. Through the Eyes of a Child et Runaway, qu’elle dédie à ses débuts, font remonter l’émotion d’un public conquis depuis maintenant dix ans. Dans la dernière ligne droite, The Seed, The Blade et Starvation frappent par leur intensité politique et émotionnelle. Enfin, une partie des publics des gradins se lèvent, se laissent envouter par la puissance d’une fin de titre plus techno que jamais. Puis, Aurora clôt le set principal avec Giving In to the Love, dans une explosion de lumière et de chœurs.

Le rappel tant attendu se fait évidemment sous les applaudissements les plus nourris. Ils le seront d’autant plus à l’arrivée de Pomme sur scène, main dans la main avec l’héroïne de la soirée. Everything Matters, offre un duo franco-norvégien délicat, complice et bouleversant. Nous n’en doutions pas, nous en sommes plus que jamais convaincu.es : le tandem fonctionne, les voix s’harmonisent, les regards sont logiques. Sous les applaudissements et les « mercis, à tout à l’heure » de Aurora, Cure for Me se lance, hymne queer et décomplexé. La danse très connue du clip est reprise par des danseuses sur écran géant, vêtues de masques dans une tenue aux couleurs ternes. Le public, dès lors qu’il le peut, essaie de reprendre cette danse plus que connue. Aurora, elle s’accapare comme depuis le début du concert l’intégralité de la scène. Invisible Wounds clôture la soirée dans une ambiance plus calme, une manière de « calmer les âmes » selon la chanteuse, après une soirée qui transporte dans toutes les émotions.
Deux heures, presque, de concert, mais une sensation bien plus rapide. Aurora fait voyager, émeut, convainc sans difficulté, un Zénith plus comble que jamais. Par chance, elle est programmée à Rock en Seine le vendredi 22 août. Dire que nous avons hâte serait un euphémisme.