S’il y a bien un duo qui révolutionne la scène rock, c’est bien Nova Twins. En deux ans, Georgia et Amy font le tour du monde avec leur album Supernova, qui a convaincu du Sziget à Glastonbury en passant par Rock en Seine. C’est justement sur ce festival, le dernier de leur tournée, que nous les rencontrons.
Vous jouez aujourd’hui à Rock en Seine, vous êtes en pleine tournée, vous sortez aussi d’un concert à Glastonbury. Alors, la tournée se passe bien ?
Georgia : Nous avons fait 26 festivals cette année, Rock en Seine était le tout dernier. C’était génial de finir en France, nous adorons ce pays. Mais oui, c’est la fin de la saison des festivals pour nous.
Comment vous sentez-vous maintenant ? Vous êtes prêtes pour ce grand changement de rythme post-tournée ?
Amy : Nous avons tourné toute l’année. Donc nous sommes prêtes à prendre quelques semaines. Nous écrivons notre prochain album depuis chez nous, donc nous avons hâte de nous y mettre pour de vrai. Sur la route, nous avions tant à faire qu’il était dur de rester focus. Donc maintenant, on va se concentrer sur le prochain album, on a très hâte.
L’année dernière, vous avez sorti l’album Supernova et depuis, vous êtes en tournée. Quelles leçons tirez-vous de ces deux ans de tournée avec cet album ?
Georgia : C’est une bonne question. J’ai l’impression que nous avons beaucoup appris. C’est la plus grande tournée de notre vie. Le premier album est sorti pendant la pandémie. C’est la première fois que nous faisons vraiment tourner un album dans différents pays, nous étions encore au Japon la semaine dernière. C’était incroyable de pouvoir voir différents publics et de voir comment ils réagissent aux chansons, de partager notre musique de cette manière. Ce fut un voyage incroyable et nous n’oublierons jamais une telle expérience.
Comme le nom de votre dernier album est Supernova et que vous êtes les Nova Twins, pensez-vous que vous êtes vos propres super-héros ?
Amy : (rires) Je pense que nous aimons être ce côté surréaliste d’une certaine manière, nous aimons nous perdre dans l’idée d’être dans notre propre film d’action. On le ressent pas mal dans nos clips. On aime vraiment cette idée de pouvoir faire ce que l’on veut. Si nous voulons être capables de ne pas nous battre contre un tas de robots, faisons-le, éliminons-les. C’est vraiment un truc super.
En parlant de l’artwork de Supernova, on a un côté très coloré, très rétro, presque années 80. Dans le rock et le punk, on a souvent une image très sombre, presque noire et blanche. Pourquoi ce contraste, par ailleurs très intéressant ?
Georgia : Je pense que nous ne pourrions pas faire différemment même si nous essayions. Nous aimons la mode, nous aimons fabriquer des vêtements, nous aimons l’art, la peinture, les vidéos musicales d’action, ce serait bizarre pour nous de ne pas le faire. Je pense que nous encourageons les gens à être eux-mêmes et qu’ils veulent être colorés, faisons un espace pour nous dans la musique heavy pour être colorés et s’habiller comme on veut. C’est ce que nous essayons de promouvoir.
C’est un peu l’idée de votre titre Cleopatra, qui défend l’idée d’être fiers de qui nous sommes, d’où nous venons.
Amy : Complètement. C’est une célébration de soi-même. Nous voulons essayer d’élever notre public et de le mettre à l’aise, de le voir et de l’entendre. Nous ne cherchons pas l’approbation des autres, et nous voulons que notre public se sente comme ça aussi. Ils peuvent venir, être eux-mêmes et ne pas chercher l’approbation des autres. Nous sommes une communauté de différences, et c’est ce qui est génial. Il faut les célébrer.
J’ai entendu dans certains médias que vous aviez dit que vous n’aviez pas réalisé qu’il y avait vraiment deux femmes qui faisaient de la musique punk rock. Avez-vous l’impression qu’aujourd’hui, vous en avez une image différente ? Comment vous sentez-vous aujourd’hui dans l’industrie musicale ?
Georgia : Quand nous avons commencé, nous étions naïves, nous voulions juste faire de bons concerts, signer en label, en fait juste développer notre carrière. Mais tu te rends compte qu’en fait, ce n’est pas si facile (rires). Nous avons vraiment travaillé dur. Pendant longtemps, nous avons eu l’impression d’être le seul duo de meufs noires sur les affiches des festivals. Même sur les autres scènes, en backstage ou même parfois dans la foule, nous ne voyions pas tant de différences. Nous voulons vraiment être un duo qui nous ressemble, mais aussi qui ressemble aux gens. Le public doit pouvoir repartir avec une idée positive, car nous représentons tellement d’autres groupes, tant d’autres personnes comme nous. Je me dis que nous avons maintenant une visibilité, que nous avons travaillé dur. Il faut que les choses évoluent et être un espoir pour de nombreuses personnes à venir.
De plus en plus de festivals, dont Rock en Seine et Glastonbury, essaient d’atteindre la parité dans les programmations. Même si c’est important que les festivals le fassent, vous pensez que le problème vient de leur échelle ? Ne faudrait-il pas voir le problème à la base, dans la découverte de nouveaux problèmes ?
Amy : Les gens doivent ouvrir leur esprit, leurs oreilles et leurs yeux et regarder ce qui se trouve devant eux. Les festivals et les labels sont des entités très distinctes. Les labels n’ont pas forcément compris notre projet lorsque nous sommes apparues pour la première fois en tant que groupe. Ce sont les promoteurs qui nous ont sauvées et qui nous ont fait tourner dans un premier temps. Nous avons probablement fait l’équivalent de 50 ans de concerts au cours de l’année dernière (rires). Mais il a fallu travailler vraiment dur pour atteindre tout ça. J’ai l’impression que ça n’aurait pas dû être si difficile pour nous, alors que c’est plus facile pour nos homologues masculins. Au début, lorsque l’on criait sur scène, nous étions perçues comme trop agressives. Si nous faisions de la musique heavy, on nous disait que c’était trop, que nous aurions dû faire du hip hop. C’était toujours trop ou pas assez. Maintenant, les choses ont changé, il y a plus de diversité, de femmes dans les groupes et en général. Nous sommes heureuses de voir que la diversité a évolué, de surfer sur la vague avec nos pairs et de continuer à changer les choses.
Pour vous, la scène internationale est en train d’évoluer ?
Amy : Il y a de nouveaux artistes. C’est comme la musique rock en général. On voit toujours les mêmes vieilles têtes d’affiche et on a besoin d’en avoir des nouvelles, sinon le rock va mourir, alors qu’il est bien vivant ! Il y a tellement de grands artistes, mais nous devons les développer, surtout en festivals. Nous faisons de la musique en direct. De la vraie musique en direct. De la vraie musique. Une véritable expérience. Nous ne pouvons pas laisser cela s’éteindre. Sinon, ça va être un putain de désastre.
Comment va évoluer le rock, d’après vous ?
Georgia : Le rock est déjà en train d’évoluer avec le nombre de femmes qui sont sur scène. Elles créent quelque chose de différent en ce moment parce qu’elles n’ont pas les mêmes influences que leurs homologues masculins. Elles ont une carrière, elles sont nombreuses et elles arrivent en force. C’est incroyable. Juste aujourd’hui à Rock en Seine, il y a Amyl and the Sniffers sur scène qui sont en train de tout déchirer. C’est vraiment une question d’équilibre, il faut plus d’égalité, de diversité, je ne sais pas vraiment si on va pouvoir atteindre ça, mais on en a vraiment besoin.
Amy : En ce moment, la scène underground est en plein essor et ça va être intéressant de voir comment ça va se croiser. Dans les années 70, je suppose que le rock était le truc, le punk était le truc au Royaume-Uni, c’était la pop de l’époque. Maintenant, on a de la pop extrême. Mais le rock s’impose toujours. Ce serait bien que le rock connaisse à nouveau son heure de gloire.