Sombre Clair

En plein milieu d’une tournée des festivals et quelques mois avant un concert à l’Olympia, Johnny Jane se retrouve devant un public nombreux à Solidays. Après plusieurs EP et un album sorti le 12 avril, l’artiste a déjà acquis un grand nombre de fans. Il revient sur son parcours et son album lors d’une rencontre à Solidays.

Tu es aujourd’hui à Solidays, sur une tournée des festivals. Quel est ton ressenti devant tous ces publics ?

Ça dépend de plein de choses. Là, pour le coup, j’étais un peu malade, j’ai eu plus de mal à rentrer dedans, même si c’était super chouette. L’horaire aussi s’inscrit vachement dans ton ressenti. Parfois tu joues plus tard, au Printemps de Bourges, j’ai joué à presque minuit, donc rien à voir. Là c’est plus tôt, on met plus de temps à rentrer dedans. Ce soir à Solidays, le public était super généreux, très différent de Bourges où je jouais surtout devant des professionnels. C’est toujours très aléatoire. Ça dépend du public, de l’horaire, de la scène, du son, des balances… Le plus souvent, on est très heureux, on fait jamais la gueule après un concert. Lorsque l’on voit les publics chanter avec nous, c’est super émouvant, ça me touche, ça me transport de voir des gens avec le sourire, ils hyper heureux, ils sont généreux, ce sont des cadres exceptionnels. Il faut profiter à fond.

Johnny Jane – Solidays 2024 © Marylène Eytier @aubondeclic
En Octobre, tu vas jouer à l’Olympia. Quel est ton cheminement, plutôt rapide, expliquant cet engouement ?

Je sais pas si on peut parler d’engouement, ce serait un peu un mot qui de ma bouche pourrait paraître prétentieux. Moi, je trouve ça assez naturel, en tout cas un engouement naturel. Ce n’est pas du tout un truc où il y a eu une ruée hyper rapide sur moi. J’ai toujours cherché à mettre la barre plus haut musicalement dans les concerts, a toujours relever le défi de faire mieux. Je pense que pour l’instant, je dis bien pour l’instant, le résultat est là. Les gens voient que je propose de plus en plus de plus en plus de musiques différentes, j’essaie dans l’album de me renouveler dans chaque EP, de faire encore mieux. Je vois des artistes qui font un Olympia en un an. Il m’a fallu quatre ans. Entre temps, j’ai fait le Pop Up du Label, la Maroquinerie, la Gaité Lyrique, la Cigale, c’est très progressif. En tout cas pour moi, comment je le ressens, c’est assez chouette de voir cette évolution naturelle. Je suis content d’avoir réussi à créer une sorte de solidité, un ancrage assez profond dans ce que je propose. Je vois que le public est sincère, que les gens qui m’écoutent sont là et reviennent. Les gens qui étaient à la Maroquinerie sont venus à la Gaité Lyrique, puis à la Cigale, ils seront là à l’Olympia. Ce n’est pas juste un truc comme ça, un feu de paille. Il y a eu une vraie histoire. Ça se construit avec du travail et de l’honnêteté.

Concernant ton album Attitude(s) qui est sorti le 12 avril. Avec ce jeu des parenthèses nous avons ce complexe entre le singulier et le pluriel. Tu as pourtant un titre, Attitude au singulier, ce jeu de mots vient représenter des états d’âme au moment de l’écriture ?

Bien sûr. J’aime bien parce que le mot Attitude, ça sonne bien. J’ai toujours aimé mes chansons comme Justine :

“Je ne ressemble à rien quand je suis sans toi
Tes lèvres m’ont éteint tout autant que toi”

J’ai toujours adoré dans mon écriture les rapports phonétiques, pas des voyelles, mais des consonnes, là où Attitude sonnait bien. Mais ça a pu être aussi Facette avec un « S » entre parenthèses, qui représente plusieurs personnalités, plusieurs émotions et états d’âme qui se confrontent dans un album. Ça crée une sorte de richesse. J’ai écrit des textes, des chansons dans des modes très différents et parfois se rejoignent, parfois pas du tout. Kleenex et Une Fleur, ça n’a rien à voir, 1998 à Attitude, rien à voir… Même la pochette, c’est ça aussi, j’avais l’impression que je devais jouer avec ces questions sans réponse.

Par rapport à cette pochette justement, où on voit un ce masque de toi-même, est ce que c’est une manière de créer une sorte de barrière ?

Il y a une barrière, mais à travers le jeu. Ce n’est pas qu’une protection, parce que s’il y avait une vraie barrière, tu vois, c’est ça qui est intéressant, c’est là où je joue le jeu s’opère et que j’adore ça, il y aurait un vrai masque, et pas un masque de moi. Là le masque, c’est un moulage de moi-même. C’est aussi pour montrer qu’il y a ce que je montre de moi même, que les apparences sont trompeuses. Et donc on demande quelle est la vérité, quelle est la chanson la plus vraie de l’album, est-ce qu’il y a mensonge, est-ce qu’il y a vérité… Je ne dirais rien, car j’aime bien créer ce mystère, laisser ce doute qui plane autour de la musique et des paroles.

C’est peut être une manière aussi d’être au public, des interpréter, de s’approprier directement les chansons ?

J’adore ça ! J’ai toujours adoré essayer de comprendre les pochettes, de les décrypter. J’ai toujours détesté quand on a toujours essayé de m’interpréter les choses. J’aime bien avoir mes propres idées. Et tu vois là, récemment, j’ai revu la pochette de Wallace Cleaver, avec cinq cigarettes sur fond blanc et tout, qui sont consumées différemment. J’aime bien que les gens se fassent une idée de ça. En tout cas, moi, ça me plaît de se demander pourquoi j’ai mis du bleu en fond. Certains y ont vu une référence à Gainsbourg, évidemment, moi je le sais, mais encore une fois, j’aime bien laisser le doute et les gens interpréter comme ils veulent.

Johnny Jane – Solidays 2024 © Marylène Eytier @aubondeclic
Quand tu représentes cet album sur scène avec les autres EP dont DÉSORDRES, comment arrives-tu à créer une histoire cohérente entre les titres et les idées ?

J’ai pas encore fait de virage artistique. JTM s’ancre dans Attitude(s) et DÉSORDRES. C’est pour ça que Kleenex se retrouve dans Attitude(s). C’est une suite logique qui permet de faire une progression artistique logique. Le jour où il y aura une rupture, que je ferai un album jazz par exemple, là on pourra se poser la question.

Une thématique qui relie les différents titres de cet album ? 

Je pense que la thématique, c’est ma vie, tout simplement, avec mes goûts. C’est la vérité qui relie tout. Parfois, le vide aussi, c’est le vide qui nous relie, le vide recherché, le vide subi, qui peut être vu comme une sorte d’apaisement spirituel et de sérénité. C’est aussi de la sincérité. Je pense que c’est aussi ça que les gens comprennent, même si les titres sont très différents, je pense que tout s’ancre dans une forme de sincérité.

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