Flavia Coelho, c’est la chaleur, le sourire et la bonne humeur. Derrière ces instants de lâcher prise, se cachent des textes plus difficiles. La musique, la danse, comme une arme : voici la vision de Flavia Coelho. Au cours du festival Woodstower, nous avons pu échanger avec elle sur son album Ginga et sur sa tournée.
Comment te sens-tu à l’idée de jouer à Woodstower ?
Je suis très excitée, car c’est notre dernière date de l’été. Nous avons eu un été formidable avec plein de festivals, de musique, et de moments d’échange avec le public. C’est ma première fois à Woodstower, et la scène est incroyable. Il fait beau, tout est parfait.
Ton album Ginga est sorti cette année. Quelle en est l’idée principale ?
Ginga est né de l’envie de changer ma façon de travailler. Je me suis inspirée de mes années d’adolescence, dans les années 90-2000. C’est une époque de transition entre les lettres et les emails. L’album mélange le funk, un peu de house des années 90, et la musique traditionnelle brésilienne. Il y a dix titres, dont un en français.
Comment intègres-tu la culture brésilienne dans une musique destinée à un public principalement français ?
Je ne me pose pas trop de questions, sinon je n’arrive à rien. Mais je fais en sorte que les mots s’harmonisent avec les accords et les mélodies. Même si le public ne comprend pas toujours les paroles, elles ont un sens. Quand on trouve les mots justes, peu importe la langue, ça touche les gens. J’aime mélanger la musique traditionnelle brésilienne avec les sonorités que j’ai découvertes en France, y compris la musique africaine et la chanson française. Un des titres de mon dernier album, De vous à moi, a été inspiré par un roman d’André Breton, L’amour fou. C’était ma façon de remercier le public pour son soutien.
Tu dis que cet album est moins politique que DNA, qui est sorti pendant la période Bolsonaro au Brésil. Est-il moins engagé pour autant ?
C’est une bonne question. À l’époque de DNA, le Brésil vivait un moment très difficile avec l’arrivée de l’extrême droite. C’était nécessaire pour moi d’en parler. Ce n’était pas mon style habituel, mais c’était une urgence. Avec Ginga, j’avais besoin de plus de légèreté. L’album évoque des souvenirs de jeunesse et de premiers amours. Mais en même temps, quand on vit au Brésil ou dans des pays occidentaux, on ne peut s’empêcher d’être engagé. Dans Mais Amor, par exemple, je parle de la force des Brésiliens qui continuent de sourire et de se battre malgré la douleur. Ginga signifie le mouvement et la danse, une autre forme d’engagement.
Peux-tu nous parler des chansons Mama Santa et Mais Amor ?
Mama Santa parle des femmes brésiliennes qui m’ont aidée à grandir. Ces femmes ne connaissent pas grand-chose à Internet, mais elles sont pleines de sagesse et de courage. Mais Amor évoque, comme je l’ai dit, l’engagement social et politique des Brésiliens qui savent rire même dans les moments difficiles.
Tu as toujours su mélanger textes engagés, poésie et musique dansante. Comment arrives-tu à ce résultat ?
Cela vient de mon vécu. Écoutez la musique cubaine, la salsa, ou la musique africaine, comme le coupé-décalé ou le ndombolo. Si vous traduisez ces chansons, elles parlent souvent de douleur. Mais elles transcendent cette douleur par la musique, le sourire et la danse. C’est notre seule issue. Même si le monde va mal, il faut continuer de bouger et de se battre.
Aujourd’hui, la durée des chansons dépasse rarement trois minutes. Pourtant, tu as choisi des titres entre trois et quatre minutes. Pourquoi ce choix ?
Les chansons sont devenues plus courtes à cause de la surabondance d’informations. On est bombardé de partout et on a tendance à tout faire vite. Moi, j’ai grandi en prenant le temps de découvrir chaque détail des morceaux. Aujourd’hui, on connaît souvent seulement quelques secondes d’une chanson grâce à des réseaux comme TikTok. Je veux inviter le public à prendre le temps d’écouter. J’ai fait un album de 39 minutes avec dix titres, pour que les gens puissent vraiment s’immerger dans la musique.
En 2021, tu as collaboré avec Joao Selva, qui est aussi présent à Woodstower. Qu’aimerais-tu lui dire s’il lit cette interview ?
« João meu amor, que delícia a gente vai se ver né? Eu sei que você vem hoje!” Quelle sera ta prochaine collaboration ? Qu’est-ce que tu prépares de nouveau ? »
Quelle vision aimerais-tu que les Français aient de la musique brésilienne ?
Que le Brésil est l’un des plus beaux pays du monde et qu’il a encore beaucoup à offrir et à faire découvrir.