C’est l’un des concerts que nous attendions le plus à Musilac, à Aix-les-Bains. Au pied du Lac du Bourget, nous avons rencontré Declan McKenna, qui nous parle de sa relation aux festivals et salles en France, mais aussi de ses dates mémorables à Glastonbury. Retour sur un intense moment d’émotions.
Comment te sens-tu à quelques heures de jouer à Musilac, après plusieurs dates à Paris et à Lille également ?
Declan : Bien. Je me sens heureux. Nous avons passé une semaine très cool en Europe. Nous avons fait quelques festivals et quelques dates à nous. Le temps était très agréable, on a découvert plein de lacs différent ! On passé de bons moments et les concerts étaient très bons.
La semaine dernière, tu as joué aux Eurockéennes en ouverture de Muse. As-tu déjà fait une première partie pour un si grand groupe auparavant ?
Declan : Je ne suis pas sûr, en tout cas pas de cette manière. C’était vraiment, vraiment cool. Nous étions les seuls, avec Muse, sur l’affiche ce jour. Ils ont une production tellement énorme ! Henry, notre saxophoniste qui ne joue pas avec nous aujourd’hui mais qui l’était aux Eurocks, est un fan de longue date de Muse. Donc c’est vraiment sympa de le voir autant profiter. La foule était énorme, probablement plus grande que celle qu’on a eue à Glastonbury.
En parlant de Glastonbury, tu y as joué de nombreuses fois !
On y a joué six fois au total, sur des scènes différentes, parfois en plus petit format par rapport à 2022. C’est assez familial de jouer à Glastonbury. Ce festival représente chaque étape de ma carrière car on a évolué sur des scènes de plus en plus grandes. En plus, ils sont toujours très acueillant. Ce festival est un vrai plaisir.
On sent que tu as une grande énergie sur scène. C’est assez incroyable de voir ça. Comment fais-tu pour dompter la scène et captiver les gens de cette manière ?
Je dois juste trouver l’énergie que j’ai et la transmettre. Le jour du concert, si j’ai envie de faire quelque chose de vraiment intense, j’essaierai de le faire. J’ai toujours voulu faire un vrai spectacle, ça ne m’intéresse pas de me pointer et de juste jouer mes titres. On veut proposer quelque chose de différent à chaque fois qu’on fait un concert, pour que ça reste une surprise autant pour le public que pour nous sur scène. J’essaie de tout donner, notamment sur le dernier titre, ce qui fait que je suis souvent assez fatigué à la fin des concerts.
La musique proposée en France est parfois assez différente de ce que l’on peut avoir dans le reste de l’Europe, notamment en Angleterre où l’on a plus de rock, par exemple. Trouves-tu compliqué d’attirer le public français ?
J’aime penser que je peux trouver des fans partout, des gens qui vont aimer la musique que l’on propose. Je cherche juste à donner la meilleure version de moi-même sur scène, en espérant que les gens vont apprécier. De toutes façons, les tendances vont et viennent, n’est-ce pas ? Je me souviens avoir fait des concerts en tête d’affiche en France avant qu’on soit ailleurs. Tu trouves toujours les bonnes personnes. Et puis, les gens aiment encore le rock.
Il y a eu trois ans entre « What Do You Think About The Car » et « Zeros », ton nouvel album. On sent une grande évolution entre ces deux albums. Pourquoi avoir laissé ce temps entre ces deux opus ?
Au départ, l’album devait sortir plus tôt, mais évidemment le COVID l’a retardé. J’ai passé du temps à réfléchir à ce que je voulais faire. Avant même d’avoir terminé la tournée et le premier album, je réfléchissais déjà aux nouvelles chansons. Mais bon, je me suis dit que je devais trouver un concept plutôt que d’écrire et de sortir quelque chose rapidement. Sur le premier album, j’ai écrit mes chansons comme je l’ai toujours fait. Pour le second, je voulais vraiment trouver quelque chose pour savoir dans quelle direction aller et creuser cette niche. C’est un peu de cette manière que je pense pour le prochain album. Je veux l’aborder d’une manière différente et le rendre intéressant.
Est-ce que tu as l’impression que maintenant que tu as évolué dans l’industrie musicale, tu as plus de liberté d’être toi-même ?
Peut-être. Du côté de l’industrie, les professionnels sont toujours à la recherche d’une chose que tu as déjà faite, mais parfois ils finissent par te dire comment le faire. Il faut trouver une façon de faire les choses. Il y a une différence, je suppose, entre le moment où tu commences à écrire de la musique et la carrière qui grandit. Au début, il n’y a pas de pression pour créer. Quand es sous contrat pour un album ou que tu as un certain nombre de choses à faire, tu te dis « oh merde, j’ai la responsabilité de faire quelque chose ». Après, la tournée est vraiment importante pour moi. J’adore créer, mais quand ça ne me semble pas bien, je ne peux pas le faire.
Dès la première seconde du titre « You Better Believe » qui ouvre ton deuxième album, on est emporté par la batterie qui introduit ta présence vocale. C’est un genre d’expérience que l’on peut vivre sur scène aussi ?
Oui, je pense que c’est un set à forte énergie. Nous avons évidemment des moments plus ou moins intenses. Je pense que l’idée derrière l’album, c’était qu’il soit vivant et un peu rauque, avec une batterie puissante et beaucoup de sons aigus. Le ton est très tranchant et très agressif sur l’album, c’est ce que l’on essaie de montrer sur scène. Pour le premier album, le live était naturellement plus intense que le studio. Même si nous avons toujours ces moments intenses, je pense qu’il est important de se retirer, d’être plus calme à certains moments. C’est un peu là où en est le spectacle en ce moment.
Depuis le début de ta carrière que tu as commencé jeune, tu es un chanteur très engagé. Comment tu positionnes ton art ?
Je pense que je me suis retrouvé à être engagé quand j’étais à l’école. J’avais un groupe d’amis qui m’a rendu très ouvert à tous les types de musique et à toutes les formes de pensée, en matière de politique, par exemple. Les choses ont vraiment démarré lorsqu’il qu’il y avait beaucoup de choses dont je voulais parler. La musique est ma façon d’apporter une contribution et d’essayer d’avoir un impact sur les choses. Ce que je n’avais pas réalisé, c’est que ça finirait par signifier quelque chose pour les gens. Parfois, le but est de s’amuser et parfois le but est plus important.
Dans la chanson « Beautiful Faces », on peut lire que ce titre est un « hymne courageux pour la jeunesse condamnée« . Qu’est-ce que tu peux comprendre là dedans ?
Quelqu’un a dit ça ? Ce n’était pas moi (rires) ! Je ne sais pas si j’appellerais ça du courage, mais quelqu’un l’a appelé ainsi apparemment (rires). Avec « Beautiful Faces », je parlais de la figure effrayante de notre époque moderne, ce monde où tout est en ligne, avec tant de choses qui se passent sur Internet et tant de nouveaux défis, c’est effrayant. J’ai l’impression que cette chanson résume bien l’anxiété partagée parmi les jeunes. Évidemment, ça va plus loin que juste les médias sociaux. Nous sommes anxieux de savoir où nous sommes, si nous avons un avenir… C’est un peu le thème général de l’album. L’idée que j’avais quand j’ai commencé l’album était d’écrire une chanson pour chaque manière dont le monde pourrait finir. Je suppose que « Beautiful Faces » représente l’une de ces façons dont cette sorte de civilisation pourrait s’effondrer.
Y a t-il un texte qui a un message plus important que tu aimerais transmettre ?
Je préfère que les gens décident par eux-mêmes. Il y a des messages à en tirer, mais je pense que le bon art peut être traduit de différentes manières. Et je pense que l’idée de « Zeros » est basée sur une sorte de fantaisie. Il y a tellement de préoccupations en ce moment. Je ne veux pas trop mettre en avant ce que je fais en tant que musicien, je ne suis pas la personne la plus importante du monde. Il est nécessaire que les gens se forgent leur propre compréhension par eux-mêmes, qu’ils soient capables d’avoir leurs propres conversations originales. Je ne transmets pas des connaissances spéciales à qui que ce soit. En fait, il y a beaucoup de jeunes autour de nous qui sont bien plus au courant que moi de ce qui se passe. Mais je pense que l’important, c’est que les gens puissent être un peu inspirés pour agir et pour essayer de créer un monde meilleur.